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Embarquez sur le Pequod!

Une adaptation théâtrale de Moby Dick d'Herman Melville On est projeté, à bord du baleinier Le Pequod, dans l’immensité des océans, tout contre les créatures qui les peuplent et au cœur des tempêtes qui les agitent. Avec Ishmaël, Queequeg, Starbuck et Achab, on prend le large, dans l’espoir de voir surgir des profondeurs le front ridé du monstre. Ici, tout est suggéré avec finesse et poésie : on est en mer comme face à l’écran d’un vieux cinéma, dans une salle de bal comme au fond d’un aquarium. Le théâtre de Matthieu Cruciani déploie ses métaphores et joue avec les échelles ; on suit les personnages avec délectation; narration et dialogues s’entremêlent à grande vitesse et au bout du suspense, on retient son souffle pour se demander : et moi, où est-ce que je me situe dans l’univers ? Qui me retournera le cœur comme la baleine blanche a retourné celui d’Achab ? Après Frankenstein, Fabrice Melquiot adapte un nouveau chef-d’œuvre de la littérature anglo-saxonne : Moby Dick. Roman d’aventures, quête initiatique, récit de voyage, traité de cétologie, le roman d’Herman Melville - plus de 700 pages trépidantes, lyriques, savantes, toujours éblouissantes - raconte le périple du capitaine Achab pour se venger de l’immense cachalot blanc qui lui a arraché la jambe au cours d’une chasse.

La parole du metteur en scène Mathieu Cruciani

Moby Dick remontée des enfances La passion que nous partageons pour ce roman, Fabrice Melquiot et moi-même, est comme remontée des enfances, et éclairée par l’âge adulte. Elle date d’un âge où s’embarquer sur un bateau est comme s’embarquer pour l’avenir. On lit Stevenson, Conrad, plus tard Lowry, Aiken, Michelet. Le roman de marine est l’Eden des jeunes lecteurs romanesques. C’est le goût des aventures maritimes au long cours, le goût de la mer, pour tout ce qu’elle a de sauvage et de mystérieux, on l’aime pour sa brutalité, ses infinis. C’est le goût de l’exploration par la langue et ses expériences, l’intuition que des mystères luisent dans les lettres. C’est le grand ailleurs du monde des adultes, un horizon mouvementé que l’on désire et que l’on craint lorsqu’on est enfant. C’est le goût de se faire peur, un peu, et de se rêver aventurier, beaucoup. Le goût des possibles et des devenirs. Y revenir adulte est un plaisir naturel, mieux, comme une jouvence, comme d’adapter ce roman monstre, roman de formation à l’action palpitante pour de jeunes spectateurs : nous nous adressons aux enfants d’aujourd’hui, comme parlant depuis les enfants que nous étions hier. Voilà le projet qui nous anime. Tout d’abord bien sûr, faire pièce de théâtre d’un roman immense, passer du conte au dialogue, du silence de la lecture au tumulte incessant d’un équipage en mer, c’est répondre à l’aventure par une autre aventure, théâtrale, mais c’est aussi retrouver l’émotion d’une lecture première, confronter nos savoirs à nos passions enfantines. Antoine Vitez écrivait après son Faust qu’il avait compris que tout était possible au théâtre, même de traiter l’intraitable. Comme expérience ultime, il se proposait même de mettre en scène Moby Dick... D’une enfance à l’autre pourtant, les époques changent. Vite. L’heure, peut-être, est moins à la lettre, au verbe, nous-mêmes avons vécu ce transfert des vecteurs imaginaires, plus attirés aujourd’hui par l’image, le mouvement, le scénario, que par la poétique. La grâce de certains romans, funestement estampillés classiques, est précisément de mêler fiction pure, fable musclée de rebondissements avec une poétique ambitieuse, des métaphysiques actives, fiévreuses, vitales. C’est en tout cas la grâce du roman de Melville. Ensuite faire théâtre d’une aventure maritime, faire entrer l’océan et ses plaines liquides, homériques, son ciel immense et ses cachalots géants, ses temples d’eau, ses tempêtes, la foule bigarrée et pleine de force d’un équipage sur un plateau de théâtre, c’est un vrai défi de représentation, et une invitation au voyage et à l’imaginaire de tous, créateurs comme spectateurs. C’est comme un exercice de cartographie. Enfin, toujours, nous tenterons de nous approcher du mythe, comme d’autres du soleil, pour tenter de comprendre. Qu’est-ce qui, dans une figure, fut-elle celle d’une baleine blanche, fait légende, et par là crée des symboles d’une force telle qu’ils échappent aux cercles des époques, résonnent dans le temps. Du Léviathan de Job au requin meurtrier d’un film de genre, nous appréhendons par le monstre un peu mieux nos propres abîmes, nos peurs, et la force qu’il faut pour les accepter, en jouant avec elles.

La parole de l'auteur Fabrice Melquiot

Pourquoi Moby Dick? Adapter Moby Dick au théâtre, qui plus est dans un souci d’accessibilité du spectacle à un public jeune, est une entreprise impossible et indispensable. Impossible, parce qu’on n’enferme pas sept cents pages de roman dans une heure de théâtre. Pas question d’offrir un condensé de la fable, un synopsis étriqué, asservi aux faits et situations. Pas question non plus « d’imiter le roman » et de céder à l’illustration réaliste, autrement dit de chercher avec les moyens rudimentaires, artisanaux, du théâtre, à produire du spectaculaire de cinéma. Le lieu où l’on cherche à jouer, c’est bel et bien l’espace mental du spectateur, qui est vaste et ce, dès le plus jeune âge. Et ce que l’on cherche à faire jouer, c’est un chœur de marins qui cherche tout un monde, le monde entier, dans une baleine blanche. Ce que l’on cherche à faire jouer, c’est la poétique melvillienne, la langue de Moby Dick, dans une forme qui serait mienne, contre une autre langue, qui serait mienne elle aussi. Ce que l’on cherche à faire jouer, c’est une fable née de la fable rapportant la fable première en lambeaux, ce sont des monologues recomposant les paysages, les quêtes, les mystères (des récits croisés, part romanesque du théâtre), mais aussi des chansons, des poèmes; bref, une structure en fragments, bribes du roman jetés sur scène en pâture à cinq acteurs qui doivent le reconstruire. Pour chercher à faire jouer Melville dans mes propres phrases, j’ai choisi de m’appuyer sur le cut-up (échantillonnage, prélèvements...), la technique d’écriture théorisée par Bryon Gysin, William Burroughs ou Christian Prigent. Il s’agit bien de noyer Melville en moi et de me noyer en lui. Fusionner les deux poétiques; les marier, pour le meilleur, espérons. Moby Dick est un roman total, roman d’aventures et grand livre métaphysique, réflexion sur l’humain et ses aspirations, sur l’Amérique et son vieux mythe dévorateur, sur l’Ouest splendide et sanguinaire, de côtes noires et de désert de vagues. Un voyage sur l’open road maritime, loin de la civilisation et en écho à Hawthrone et Emerson, Faulkner et Kerouac. La baleine hante le livre comme un Sioux devant la Terre promise. De l’autre côté, une fois le harpon fiché dans la chair blanche, serons-nous enfin Dieu ? Une question si innocente, parce qu’un roman est toujours innocent. Sur son navire, l’homme avance ainsi, se demandant quel rapport il entretient avec lui-même, avec l’autre, avec le cosmos. Ici, de grandes actions, de grandes quêtes, de grandes questions, comme seuls les enfants peuvent en espérer. Au théâtre de répondre à cette faim d’aventures intérieures, avec l’intelligence et les moyens qui lui sont propres.

Biographies

MATTHIEU CRUCIANI Né en 1975 à Nancy, Matthieu Cruciani est membre de l’Ensemble Artistique de La Comédie de Saint-Étienne depuis 2011. Il est metteur en scène, acteur, et directeur artistique de la compagnie The Party, associée à La Comédie. De 2008 à 2010, il est en compagnonnage DMDTS avec le collectif des Lucioles, à Rennes et dans ce cadre il met en scène Plus qu’hier et moins que demain, avec Pierre Maillet. En 2010, il est sélectionné pour le festival Premières, au Théâtre National de Strasbourg, pour sa mise en scène de Gouttes dans l’océan, de Fassbinder. FABRICE MELQUIOT Né en 1972 à Modane, Fabrice Melquiot est aujourd’hui l’un des auteurs de théâtre contemporain les plus joués et les plus traduits à l’étranger. Il est connu à la fois pour son théâtre cru et poétique, où la fiction est dense et puissante, et pour ses pièces destinées au jeune public. Il est l’auteur d’une quarantaine de pièces, mais aussi de traductions et de deux recueils de poèmes. Il a reçu en 2008 le Prix Théâtre de l’Académie Française pour l’ensemble de son œuvre. Depuis 2012, il dirige le Théâtre Am Stram Gram de Genève.

Distribution et Crédits

D'après Moby Dick d'Herman Melville Adaptation Fabrice Melquiot Mise en scène Matthieu Cruciani Avec Sharif Andoura Arnaud Bichon Émilie Capliez Yann Métivier Martynas Tiskus Assistante à la mise en scène et vidéo Tünde Deak Scénographie Marc Lainé Lumière Bruno Marsol Son Clément Vercelleto Costumes Claire Risterucci Ateliers décor et costumes La Comédie de Saint-Étienne Coproduction La Comédie de Saint-Étienne–CDN, Théâtre de Sartrouville et des Yvelines–CDN et Compagnie The Party. Un spectacle Odyssées, biennale de création théâtrale en Yvelines conçue par le Théâtre de Sartrouville et des Yvelines–CDN, en partenariat avec le Conseil général des Yvelines. Texte publié chez L’Arche éditeur. Création le 16 janvier 2014 au Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines – Scène nationale.

Dès 8 ans

D'après Herman Melville
Adaptation Fabrice Melquiot
Mise en scène Matthieu Cruciani


SEPTEMBRE
mar 30 19h
OCTOBRE
sam 04 17h
dim 05 17h

DOSSIER DE PRESSE

Photo Moby Dick
M2∏JeanLouisFernandez095 Photos Jean Louis Fernandez